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You had your best-laid plans and then COVID-19 came along and hammered the entire economy. But you’ve got this – if you have the right information. Join Rob Carrick and Roma Luciw on Stress Test, a podcast guiding you through one of the biggest challenges your finances will ever face.

Rob : Vous avez dépensé plus que d’habitude pour quelque chose que vous vouliez vraiment, vraiment. Du moins sur le moment.

Roma : Avec un peu de chance, cette folie que vous avez faite vous a apporté une joie durable. Mais elle vous a peut-être aussi donné des regrets et vidé votre compte en banque.

Rob : Bienvenue à Test de résistance, une baladodiffusion sur les finances personnelles pour les milléniaux et les membres de la génération Z. Je m’appelle Rob Carrick, je suis chroniqueur financier au Globe and Mail.

Roma : Et je suis Roma Luciw, rédactrice en chef de la section des finances personnelles du Globe and Mail. Aujourd’hui, nous parlons des achats impulsifs, des folies que nous faisons. Nous sommes humains. Il nous arrive à tous de nous laisser tenter de temps en temps. N’est-ce pas l’une des raisons pour lesquelles nous travaillons si dur?

Rob : Si les folies sont bonnes pour le moral, elles peuvent être très mauvaises pour le portefeuille. Comment planifier les dépenses de manière à ne pas nuire à vos finances?

Roma : Je pense qu’il est important de noter que les folies existent depuis longtemps, n’est-ce pas? Si le phénomène n’est pas nouveau, il semble s’être amplifié depuis la fin de la pandémie. Qu’il s’agisse de voyages, de repas au restaurant, de sacs à main ou de concerts, les temps sont plus durs que jamais et les gens en profitent pour faire des folies. Rob, pensez-vous que les dépenses ont évolué ces dernières années et que nous sommes devenus un peu excessifs avec toutes ces dépenses?

Rob : Je mets tout cela sur le compte de la pandémie, que l’on peut rendre responsable de presque tous les maux. Les gens étaient confinés, et quand tout a commencé à rouvrir, il y a eu cette tendance à dépenser pour se rattraper, et maintenant c’est devenu comme si les gens avaient peur de rater quelque chose, ils veulent se gâter et n’hésitent pas à faire des folies pour vivre des expériences. Je pense que cela a fait boule de neige et que c’est devenu quelque chose de très important, quelque chose d’accepté, une dépense normale : nous devons faire des folies. Et oui, en effet, je pense que ce phénomène a pris trop d’ampleur. Bien sûr, je veux que tout le monde puisse faire des folies. Je veux que chacun puisse se récompenser pour son travail. Mais cela doit rester dans les limites du raisonnable. Et nous sommes peut-être en train de perdre cet aspect de vue.

Roma : Oui, les contraintes de chacun semblent avoir disparu. N’est-ce pas? Nous fonçons tous sans hésiter, sans trop réfléchir.

Rob : Oui, je pense que l’expérience est importante pour nous. Nous voulons la vivre, mais sans tenir compte du coût.

Roma : L’un des aspects intéressants, en matière de finances personnelles, c’est ce déni qui semble exister. Nous ne parlons jamais de dépenses, vous ne trouvez pas? Nous parlons beaucoup d’épargne. Nous parlons d’investissement. Nous parlons de ce que l’on est censé faire. Mais il est évident que les gens dépensent. Le problème, c’est lorsque les dépenses deviennent incontrôlables, cela a des conséquences. Stress, anxiété. Évidemment, le problème est en partie dû au fait que tout est devenu si cher aujourd’hui. Pourquoi cela n’empêche-t-il pas les gens de dépenser, Rob?

Rob : C’est un peu comme si nous nous étions habitués à dépenser plus et à être sidérés par le coût des choses. Et lorsque nous découvrons le coût de notre folie, nous nous disons que nous devons encore payer pour tout le reste. Cela me semble normal.

Roma : Notre première invitée ne regrette certainement pas d’avoir fait des folies, même si les détracteurs critiquent ses habitudes de consommation.

Naomi : Bonjour, je m’appelle Naomi. J’ai 30 ans et je vis à Mississauga, en Ontario.

Rob : Naomi est infirmière pédiatrique, et elle s’offre une vraie petite folie.

Naomi : Cela fait longtemps que je suis une fan de Taylor Swift. Depuis le début en fait. Je crois que ma plus grosse dépense, ce sont les spectacles du Eras Tour. J’ai assisté à quatre des spectacles aux États-Unis jusqu’à présent, et j’ai deux billets pour Toronto.

Rob : Les billets du Eras Tour sont extrêmement coûteux et difficiles à obtenir. Naomi a évalué le prix qu’elle est prête à payer.

Naomi : Le billet le moins cher que j’ai acheté, c’était celui du spectacle de Nashville, au dernier rang du stade. Ces billets coûtaient environ 100 dollars canadiens. Et les billets les plus chers que j’ai achetés étaient pour le spectacle à Detroit, au niveau 100. Ils coûtaient 658 dollars.

Rob : En tout, Naomi dit avoir dépensé environ 3 000 dollars en billets pour les six spectacles. Mais les coûts ne s’arrêtent pas là. Elle estime avoir aussi dépensé 2 000 dollars pour les billets d’avion vers Nashville, l’essence pour Detroit et Cincinnati, les hôtels, les Uber, la nourriture, les marchandises et, bien sûr, la visite de l’exposition Taylor Swift au Country Music Hall of Fame de Nashville.

Naomi : Mes amies et moi avions plus ou moins établi un budget. Et quand nous avons vu le prix des billets dans chaque section, nous nous sommes dit que nous devions faire le saut immédiatement, et que nous pourrions y réfléchir plus tard, surtout que les billets que j’ai eus à Detroit coûtaient plus de 600 dollars. Je n’avais pas forcément envie de dépenser autant d’argent pour des billets, mais ce spectacle coïncidait avec l’anniversaire de mon amie. Nous nous sommes dit que nous devions être là pour son anniversaire, et que nous devions acheter les billets, au risque de le regretter. Mais en fait, c’est une occasion extraordinaire. Et elle fêtera son anniversaire avec Taylor. Mes amies et moi mettions à tour de rôle nos billets sur nos cartes de crédit. Tout finissait par s’équilibrer, parce que je vais généralement voir les concerts avec les mêmes personnes. Ensuite, nous nous arrangeons pour régler la différence et pour nous faire des plans de remboursement entre nous. Au cas où l’une d’entre nous ne voudrait pas régler le montant total immédiatement.

Rob : Ceux d’entre nous qui ne sont pas des « swifties » se demandent sans doute pourquoi dépenser tout cet argent pour voir plusieurs fois au même concert. Surtout quand cela grève le budget...

Naomi : J’ai toujours aimé aller écouter des concerts de Taylor Swift. Elle touchait la corde sensible de chacun, jouant des morceaux de ses deux premiers albums. Et c’est un peu comme une célébration de sa carrière, mais aussi une célébration de tous les souvenirs que vous avez eus si vous étiez fan quand vous étiez jeune. Il y a eu des moments où, après avoir acheté des billets, ou après m’être préparée pour les spectacles, je me suis dit : « C’est plus cher que ce que je pensais. » Je ne dis pas que j’ai regretté ces achats. Mais cet été, en plus de ces spectacles, j’ai aussi assisté à beaucoup de mariages. Et quand j’essayais d’acheter des robes pour aller à ces mariages, ou que je prenais de l’argent pour acheter des cadeaux de mariage, je me disais que ça aurait été un peu plus facile si je n’avais pas dépensé tout cet argent pour Taylor Swift. Mais ce n’était pas un regret, parce que les concerts, surtout ceux de Taylor Swift, sont comme une oasis de bonheur pour moi. Je préfère cela à autre chose.

Rob : Naomi juge qu’elle mérite cette expérience, après les confinements de la pandémie. Le concept de dépenses et d’achats qui visent à rattraper le temps perdu lui semble très concret.

Naomi : Je suis infirmière. J’ai donc travaillé tout au long de la pandémie, et je n’ai pas eu beaucoup d’occasions de parler de la frustration et des difficultés liées au travail dans le secteur de la santé pendant la pandémie. Et pour couronner le tout, toutes les activités possibles ont été annulées. Les concerts ou les voyages que vous aviez prévus pendant la COVID ont été annulés, et lorsque la vente des billets a été annoncée, je me suis dit : « Oui, pourquoi pas? Tu as travaillé fort. Tu le mérites. On ne sait jamais quand cela va se reproduire. Alors autant s’amuser. » Tant que j’ai la possibilité d’aller faire quelque chose, je me suis dit qu’il valait mieux en profiter maintenant parce qu’on ne sait jamais ce qui va se passer, si on pourra encore aller au concert, si on pourra encore partir en vacances ou faire ce que l’on aime.

Rob : Elle n’a aucun mal à justifier ses dépenses. Mais elle sait que tout le monde ne la comprend pas.

Naomi : Il y a eu des remarques sur le fait que j’allais à beaucoup de concerts, sur le nombre de concerts ou sur l’argent que j’ai dépensé pour aller voir Taylor Swift dans d’autres villes. Ces remarques provenaient surtout de personnes qui ne comprennent pas vraiment, ou qui n’ont pas un intérêt particulier, comme le sport, dans leur vie. Je trouve que beaucoup de fans de sport me comprennent, parce qu’il leur arrive de faire des folies et de dépenser de l’argent pour aller voir des matchs. Mais il y a eu des gens, des collègues par exemple, qui m’ont dit : « Ah, tu vas à un concert. Encore... Je ne sais pas bien comment tu peux te le permettre. Comment fais-tu pour y arriver? Mais il faut dire que je vis chez mes parents, donc je ne paie pas de loyer. L’argent que les gens utilisent pour payer leur loyer, je l’utilise pour Taylor Swift. Je suis capable de faire un budget ou de mettre de l’argent de côté parce que je sais que c’est quelque chose que je veux faire et que, si je n’avais pas l’argent pour le faire, je serais très triste et ça me manquerait. J’ai des économies et des investissements, mais j’ai aussi l’intention de m’acheter une maison. J’ai de l’argent pour cela, et je cherche à déménager. J’économise donc pour cela aussi. Mais j’ai mon fonds d’épargne normal. Et j’ai aussi mon fonds d’épargne Taylor Swift.

Rob : Qu’il s’agisse d’un fan de sport qui achète des billets de saison ou d’une fan de Taylor Swift qui prend des places pour un concert, Naomi pense que ces folies ne doivent pas être jugées, et elle n’a pas l’intention d’y renoncer de sitôt.

Naomi : Je ne pense pas que j’en aurai un jour assez de Taylor Swift, mais si je ne pensais vraiment pas pouvoir me le permettre ou si je n’avais pas l’argent pour le faire, je dirais certainement non. C’est assez amusant, je me suis réveillée aujourd’hui avec l’annonce de l’ajout de concerts à Vancouver et j’ai probablement reçu deux ou trois cents textos à ce sujet. L’un des concerts de Vancouver a lieu le jour de l’anniversaire de ma meilleure amie. Donc, je pense que nous irons à Vancouver!

Rob : L’envie de faire des folies est universelle. Au sortir de la pandémie, on constate une hausse des folies plus modestes, comme les cafés spécialisés ou les déplacements en Uber. Notre productrice, Alicia, a récemment interrogé quelques-unes de ses amies trentenaires sur leurs habitudes à cet égard et sur la manière dont elles justifient ces folies, petites ou grandes.

Invitée 1 : C’est ma caractéristique financière toxique, et c’est un cliché de la génération du millénaire... Je dépense trop d’argent en café. C’est parce que l’acte d’aller chercher ce café, de marcher le matin, d’entrer dans le café et de commander ce café est un incontournable avant de commencer mon travail chaque jour. Oui, j’ai une machine à expresso à la maison, j’ai aussi du lait et tout ce qu’il faut pour faire du café à la maison. Mais cela ne m’empêchera pas d’aller m’acheter un café, et pas le plus petit format, parce que je veux que le contenant soit assez grand pour me réchauffer les mains.

Invitée 2 : Ma caractéristique toxique, c’est que j’oublie de renvoyer tout ce que j’avais prévu de renvoyer, surtout à Amazon. Il y a beaucoup de vidéos TikTok qui vous encouragent à acheter toutes sortes de choses sur Amazon. Et hop, vous commandez. En avais-je besoin? Non. Ai-je oublié de les retourner? Oui.

Invitée 3 : Mon habitude toxique, c’est que je ne gère pas bien mon temps, je suis toujours en retard et je dois prendre un Uber pour aller là où je dois aller, même si j’habite à cinq minutes du métro. Voilà. Le problème, c’est moi.

Rob : Après la pause, nous entendrons un planificateur financier qui vous guidera sur la manière d’intégrer sainement les folies, petites et grandes, dans votre vie.

Roma : Shannon Lee Simmons est planificatrice financière agréée, elle a fondé la New School of Finance et c’est une amie de longue date de notre balado. Shannon, vous êtes planificatrice financière et vous travaillez avec beaucoup de jeunes adultes et d’adultes plus âgés. Comment définissez-vous une folie?

Shannon : Je crois qu’une folie, c’est quand vous dépensez pour quelque chose qui coûte un peu plus cher que les dépenses courantes de votre budget général. C’est en général quelque chose d’agréable. Personne ne fait de folies pour quelque chose qui le rend malheureux! Vous faites une folie parce que c’est quelque chose que vous voulez, qui vous fait du bien et qui vous sort du cadre de vos dépenses quotidiennes.

Roma : Lorsque vous entendez le mot « folie », quelle est votre première réaction? Positive ou négative?

Shannon : Avec mon travail, il est inévitable que je rencontre des gens, à des réceptions par exemple. Et je ne peux pas m’empêcher de leur demander comment ça va. Ensuite, ils aiment me parler de leurs finances. Et ils ne peuvent s’empêcher de me dire la vérité. Je ne sais pas comment ça se fait... Et les gens me disent : « Bon, j’ai fait des folies. » Ma première réaction n’est pas de leur dire qu’ils devraient avoir honte. Mais plutôt de leur demander... Sur quoi, ces folies? Parce que j’ai l’impression que les folies sont quelque chose qui révèle en partie qui vous êtes et ce qui est important pour vous. Car même s’il s’agit d’une folie coûteuse, vous la faites même si vous ne devriez pas. Cette chose est importante pour vous. Le fait d’accorder de l’attention aux folies que vous faites est donc en réalité une façon de mieux vous connaître. Qu’est-ce qui est vraiment important pour moi, quel que soit le prix? C’est un aspect très intéressant des folies. Je peux en apprendre beaucoup sur une personne si je sais quelles sont les folies qu’elle fait.

Roma : D’après vous, sur quoi les gens dépensent-ils leur argent en ce moment?

Shannon : Honnêtement, sur tout, parce que chacun est différent et que ce qui est important pour une personne ne l’est pas pour une autre. Mais celles que j’observe, ce sont celles auxquelles on s’attend le plus. Beaucoup de gens aiment les vêtements, c’est une façon de se faire du bien pour eux et cela fait partie de leur identité. Ils continuent à dépenser pour des vêtements même s’ils n’en ont peut-être pas besoin, ou même s’ils pourraient trouver moins cher ailleurs. C’est comme ça que je vois les choses. Évidemment, les concerts, parce qu’ils coûtent maintenant terriblement cher, et j’ai appris, surtout après la pandémie, que la musique est vraiment importante pour le bien-être des gens. Pour voir des concerts, pour faire partie de l’action, il y a des gens qui sont prêts à payer le prix. Et je pensais une chose qui change, la hausse du coût de la vie. Des choses qui n’étaient pas considérées comme des folies avant appartiennent maintenant à la catégorie des folies parce que nous avons moins de liquidités pour la vie de tous les jours. Par exemple, des gens me disent : « Oh, j’ai fait des folies. J’ai dîné avec des amis. » Il y a un an et demi environ, on aurait dit que c’était quelque chose de normal. Mais aujourd’hui, il y a moins d’argent pour cela. Les gens essaient de réduire leurs dépenses. Aujourd’hui, ce dîner ressemble à une dépense importante, ce n’était peut-être pas le cas il y a un an et demi.

Roma : Avez-vous constaté une augmentation des folies au cours de l’année ou des deux dernières années?

Shannon : Oui, tout à fait. Je pense qu’il y a deux raisons. Première raison : comme je l’ai déjà dit, ce que l’on considère comme un luxe est en train d’évoluer, n’est-ce pas? L’autre jour, j’ai dit en plaisantant que je faisais des folies avec des poivrons rouges. C’est une blague que j’ai faite à mon mari. Mais je n’ai pas pris les verts. Voilà ce que nous sommes devenus. J’ai l’impression que ce que l’on considérait autrefois comme une dépense ordinaire est aujourd’hui considéré comme une folie. Je constate donc que la fréquence des petites folies augmente, parce qu’il y a moins d’argent, tout simplement. Nous devons faire de plus en plus de sacrifices, ce qui nous amène à faire plus de folies que ce que nous avions prévu, parce que la vie de tous les jours coûte beaucoup plus cher. Je pense que c’est la principale raison pour laquelle je constate une augmentation de ce qui est considéré comme les dépenses extravagantes. Nous en avons déjà parlé. Quand nous vivons dans la pénurie depuis trop longtemps, avec trop de règles concernant notre argent, qui nous interdisent de faire ceci ou cela, ou encore cela, ou même ça, la contrainte devient trop forte. Et les médias sociaux attisent vraiment le feu de la peur de manquer, d’être laissé de côté. Vous ne trouvez pas? Comment se fait-il qu’elle ait pu assister au concert? Comment se fait-il qu’il puisse le faire, et pas moi? En fin de compte, lorsque vous atteignez un certain point, vous vous dites : « Tant pis, je vais le faire quand même. » Votre numéro de carte de crédit est déjà dans votre téléphone, vous n’avez qu’à cliquer sur un bouton, et le tour est joué. Il est vraiment facile de faire des folies, n’est-ce pas? La technologie nous facilite la tâche si nous voulons dépenser et faire des folies. Elle veut que vous fassiez des folies, que vous dépensiez tout. Un peu comme l’anneau du Seigneur des anneaux. J’ai l’impression que la pénurie que tout le monde ressent à différents niveaux amène aussi de plus en plus les gens à se dire « tant pis, j’y vais », parce qu’on se rebelle contre le système tout entier, parce que ça ne sert à rien d’essayer de s’en sortir.

Roma : La pandémie de COVID nous a tous profondément touchés. Nous étions confinés chez nous et nous achetions des appareils pour faire de l’exercice, des bougies parfumées et d’autres objets de ce genre. Et nous dépensions peut-être un peu d’argent aussi pour des meubles de jardin, entre autres. Mais je pense que nous en sommes sortis avec une mentalité différente. Vous observez cela aussi?

Shannon : Bien sûr. Je le constate encore aujourd’hui. Je le vois parce que les gens me disent qu’ils n’ont rien fait depuis des années. Par exemple, partir en voyage. Je le constate dans le domaine des voyages, au rythme des nombreuses pauses. Beaucoup de choses comme louer un chalet ou partir avec des amis pour une fin de semaine à l’hôtel ou faire quelque chose de spécial pour un mariage, des voyages qui ont été mis en attente, comme tous les enterrements de vie de jeune fille, toutes les fêtes, tous ces événements. Tout cela est en quelque sorte surmultiplié, et je trouve que c’est stressant à gérer pour les gens. Si tous les amis qui devaient se marier depuis plus de trois ans ont attendu la dernière année, c’est la bousculade! Il y a beaucoup de plans remis à plus tard. Il y a du temps perdu à rattraper. Et l’idée est de faire des folies parce qu’elles nous font plaisir, n’est-ce pas? La pandémie a empêché beaucoup de choses, pendant longtemps. Et maintenant qu’elle est terminée, nous voulons nous rattraper. C’est tout à fait normal. Nous avons du plaisir à rattraper.

Roma : Shannon, nous avons parlé du niveau d’épuisement chez vos jeunes clients. Par exemple, les changements climatiques vont tout gâcher. Ou encore, de toute façon, je n’aurai jamais les moyens d’acheter une maison. Vous savez, mon salaire ne suit pas le coût de ma vie. Pensez-vous qu’il y a un élément qui fait que les gens se donnent la permission de faire des folies parce qu’ils ont l’impression que tout les dépasse?

Shannon : Bien sûr. Et je le comprends parfaitement. Si vous pensez qu’il est inutile d’essayer, pourquoi essayer? Vous pouvez être tenté adopter un comportement financier optimal. Comme tout coûte de plus en plus cher, un comportement financier optimal, c’est en fait ne rien faire. C’est parfois l’impression que l’on a. Je ne sais pas si c’est vrai, mais que c’est ce que l’on ressent. Par ailleurs, je pense que les médias sociaux nous ouvrent une fenêtre sur la vie des autres. Chacun a l’impression que tout le monde s’en sort, sauf nous, et cela nourrit le ressentiment à l’égard de sa propre situation financière. Est-ce un signal d’alarme pour moi quand j’entends les gens parler de cela, est-ce qu’à un moment donné, nous allons juste faire des folies, sans remords parce que ça ne sert à rien d’essayer? Je pense que, parce que la vie devient de plus en plus chère et de plus en plus difficile, vous vous donnez cette permission parce que, sinon, vous risquez d’attendre des années avant de pouvoir partir en voyage en économisant 50 dollars par mois. Est-ce que vous allez tout simplement partir, en vous disant que vous vous débrouillerez plus tard? Je comprends un peu cela.

Roma : Comment voyez-vous l’impact de l’augmentation des folies sur les finances de vos clients?

Shannon : Le seul endroit où les folies apparaissent, c’est sur les cartes de crédit. Ça a toujours été comme ça. Mais là encore, c’est la fréquence des folies que je constate. Les dépenses excessives mois après mois, c’est 300 dollars par-ci, 200 dollars par-là, et encore 100 dollars. C’est le solde de la carte de crédit qui devient de plus en plus important et qu’il est impossible de rembourser. J’assiste à une lente progression de ces folies. Cela revient, en fait, à faire une chose, essayer de la payer, puis faire une autre chose, puis essayer de la payer, et ainsi de suite. C’est un peu comme un escalier. Les dettes de cartes de crédit non réglées en intégralité sont en augmentation. L’autre conséquence que je constate, c’est que lorsque les gens font beaucoup de folies, leur confiance financière en pâtit. N’est-ce pas? Alors, c’est un double coup dur. Non seulement vous avez une dette de carte de crédit sur laquelle vous payez des intérêts, mais vous avez aussi l’impression de perdre le contrôle de la situation.

Roma : En effet.

Shannon : Il y a donc une combinaison de sentiment d’absence de contrôle et de vie plus chère à cause des paiements minimums à effectuer. Cette combinaison exacerbe un problème initial, ce qui entraîne une augmentation des folies, et c’est une sorte de cercle vicieux. Voilà ce qui se passe. C’est ma vie. Je suis quelqu’un qui a des dettes. Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire de folies, mais cela est inévitable, cela fait partie de la vie. Mais la fréquence de ces folies doit diminuer. Nous sommes tous comme ça. Vous devez faire baisser votre solde avant de vous permettre une nouvelle folie, car il est plutôt dangereux d’aller de folie en folie.

Roma : Quel est le montant de la dette de carte de crédit que vous observez?

Shannon : Une somme récurrente de 3 000 à 4 000 dollars qui demeure, mois après mois? Je peux vous dire, à titre anecdotique, que je vois plus que cela, et que je vois aussi moins. Mais je trouve que c’est le chiffre magique que personne n’arrive à atteindre. Ce chiffre, il faut le réduire le plus possible. C’est presque comme si ce solde de 3 000 dollars sur la carte de crédit devenait le nouveau zéro, vous comprenez? Alors, on se dit que tant qu’on arrive à revenir à redescendre à 3 000, c’est un peu comme si on avait remboursé pour ce mois. En fait, tout cela se fait de façon progressive. On pourrait peut-être aller jusqu’à cinq? Et puis, il y a autre chose. Au début, c’est 1 000 dollars. Maintenant, c’est 1 500. Avec les dépenses courantes, vous arrivez à vous débrouiller, mais ce sont les grosses dépenses qui ne cessent d’augmenter sur les cartes de crédit.

Roma : Comment faire la différence entre une folie « raisonnable » et une dépense à éviter?

Shannon : Pouvez-vous vous y attaquer de façon réaliste en trois mois pour tout rembourser? Oui? Si vous voulez agir à titre préventif, il faut avoir une seconde réflexion avant d’appuyer sur le bouton d’achat. C’est ce qui rend mon travail tellement plus difficile depuis quelques années, car nos données sont déjà dans le système, et il suffit d’appuyer sur un bouton pour que l’objet que vous convoitez arrive à votre porte le lendemain. Vous pouvez même le faire à 3 heures du matin. Mais si vous pouvez vous arrêter avant d’appuyer sur le bouton d’achat et vous demander : « Si je fais cela, est-ce que je peux raisonnablement le rembourser en trois mois? » Si je réduis mes dépenses, vais-je réussir en trois mois? Pourrais-je réduire mes dépenses de 100 dollars au cours des trois prochains mois et ne pas m’endetter davantage, pour pouvoir encore épargner pour ma vie quotidienne? Si la réponse est oui, je peux probablement le faire. Il n’est évidemment pas nécessaire de faire une feuille de calcul détaillée pour chaque achat, mais il s’agit d’un processus de réflexion que vous devriez suivre lorsque vous achetez quelque chose qui sort de votre vie habituelle. Combien de temps vais-je le garder, et combien de temps me faudra-t-il pour rembourser? Si vous pouvez le rembourser en trois mois, parce qu’il y aura toujours des choses que nous devrons acheter en dehors de notre vie quotidienne. Le problème, c’est la fréquence, et le gens se disent : « Pas de problème, 300 dollars, bien sûr, je les rembourserai. » Et puis, un mois plus tard, il y a un autre achat de 300 dollars, et là, on se dit : « Ah oui, c’est vrai. » Maintenant, vous devez réduire vos dépenses de 200 dollars par mois, sans compter l’achat de 300 dollars de plus que vous venez de faire. Et tout cela s’additionne. C’est l’effet boule de neige et la boule de neige grossit.

Roma : Lorsque vous rencontrez vos clients, leur conseillez-vous de se faire un budget pour les folies? Est-ce que c’est quelque chose de faisable? Parlez-nous d’un scénario idéal de ce que cela pourrait donner.

Shannon : Parfois, je demande aux gens de passer en revue leurs dépenses et de mettre en évidence les choses qu’ils considèrent comme des folies, comme des dépenses excessives. Quelles sont celles qui ne vous conviennent toujours pas et quelles sont celles que vous aimez? Celle-ci n’était pas bonne. Et je regrette celle-là. C’est bien de mieux se connaître. Il s’agit de savoir ce qui s’est passé lorsque vous avez fait cette folie que vous regrettez. En fait, j’ai peut-être fait cette folie parce que je manquais vraiment de confiance en moi à ce moment-là. Je l’ai fait pour de mauvaises raisons. Ce n’est pas vraiment une dépense qui m’a fait plaisir. C’était un achat motivé par l’anxiété. Ce n’est pas une folie qui apporte du plaisir. Il faut éviter ces dépenses, il faut s’y attaquer et reconnaître s’il s’agit d’une folie pour le plaisir ou d’une folie motivée par l’anxiété, d’une folie de rejet ou d’une folie attribuable à l’épuisement et à la commodité. Par exemple, déterminons laquelle de vos folies passées vous a été utile, pour quelles folies vous ne vous êtes pas encore dit : « Oui, je vais m’endetter pour toujours pour ça. » Je suis vraiment prêt à recommencer. Et c’est une folie qui vous a apporté du bonheur, n’est-ce pas? Bien. Et puis, il y a les folies que vous avez faites pour des objets qui font toujours partie de votre vie, et je veux qu’ils fassent toujours partie de moi à l’avenir. Planifiez en conséquence. Mettez une somme de côté, divisez-la par 12 et essayez de mettre le résultat de côté chaque mois en sachant que vous le dépenserez à un moment ou à un autre. Ensuite, lorsque vous faites cette folie, il y a comme un petit séparateur entre la folie et vous. N’est-ce pas? Tout n’est donc pas mis sur la carte de crédit. Cela permet de se déculpabiliser. Cela vous aide à gérer un peu mieux ce qui est mis sur la carte de crédit. On ressent un plaisir presque accru à faire des folies, comme si cela ne créait pas d’anxiété dans votre vie parce que vous avez mis un peu d’argent de côté, justement pour ça. Vous n’entamez pas l’épargne destinée au long terme. C’est de l’argent qui est spécifiquement destiné à vos petites folies.

Roma : Il est probablement judicieux de séparer ce compte de votre compte habituel.

Shannon : L’idéal est que les gens se fassent une retenue sur salaire, ou simulent une retenue sur salaire. Donc, le jour de la paie, vous prenez 50 dollars, par exemple, et faites comme s’ils n’étaient pas à vous, comme s’ils n’existaient pas. Et un jour, cet argent sera là pour vous. Il est également important, du point de vue psychologique, d’étiqueter ce compte, par exemple Petites folies et dépenses. C’est comme une autorisation. Ce n’est pas votre compte d’urgence, car le fait de puiser dans son épargne d’urgence pourrait provoquer une vive anxiété. Cet argent est destiné à être dépensé pour quelque chose d’amusant.

Rob : Les petites folies sont normales. Et c’est la même chose pour les factures de cartes de crédit. L’important, c’est de s’assurer que vos dépenses importantes ne vous laisseront pas dans une situation d’endettement à long terme. Roma, que retenez-vous de notre conversation d’aujourd’hui?

Roma : Premièrement, tout le monde fait des folies, mais si vos petits luxes vous ont endetté, il est temps de réévaluer vos dépenses et d’arrêter d’appuyer sur le bouton d’achat. Deuxièmement, dans l’idéal, vos folies sont couvertes par votre épargne. Pour cela, versez chaque mois une petite somme d’argent dans un compte séparé que vous pouvez appeler Dépenses qui m’apportent de la joie. Voilà de quoi dépenser sans stress. Et troisièmement, la pression qui pousse à dépenser est omniprésente. Soyez honnête avec vous-même et demandez-vous si vos achats vous rendent vraiment plus heureux. Il y a une différence entre gaspiller de l’argent et dépenser pour des choses qui sont précieuses pour vous. Vous seul pouvez répondre à cette question.

Rob : Merci d’avoir écouté cet épisode de Test de résistance. Cette émission a été produite par Kyle Fulton, Anna Stafford et Emily Jackson. Notre productrice exécutive est Alisha Sawney. Merci à Naomi et Shannon de s’être jointes à nous et à tous ceux qui nous ont envoyé une note au sujet de leurs dépenses notables.

Roma : Vous pouvez trouver Test de résistance (Stress Test en anglais) partout où vous écoutez des balados. Si vous avez aimé cet épisode, donnez-nous cinq étoiles et faites-le connaître à vos amis.

Rob : La semaine prochaine, dans Test de résistance, les jeunes adultes ont un peu plus de mal à trouver un emploi en raison du ralentissement de l’économie. Les employeurs reprennent un peu de pouvoir, et il est plus difficile d’obtenir le salaire, la flexibilité ou le poste que vous désirez.

Roma : En attendant, retrouvez-nous sur le site du Globe and Mail. Merci à tous de nous avoir écoutés.

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